Wednesday, December 21, 2011

Le CH et la peur

Randy Cunneyworth Montreal Canadiens head coach Randy Cunneyworth works the bench during the game against the Boston Bruins at the TD Garden on December 19, 2011 in Boston, Massachusetts.
Le Canadien de Montréal est une organisation riche en histoire, une organisation qui jouit d’une position unique au sein d’une culture unique en Amérique du Nord.

En raison de cette position unique, le club de hockey se retrouve souvent à l'intersection du monde sportif et du monde politique.

Ce fait a été à nouveau mis en évidence cette semaine quand, suite au congédiement de Jacques Martin, le club a annoncé l’embauche de Randy Cunneyworth comme entraineur par intérim.

Randy Cunneyworth, un anglophone unilingue issu d’Etobicoke, a vite senti les foudres des médias qui exigent un entraineur francophone.

Mais, pourquoi ce brouhaha? Après tout, d’un point de vue pragmatique, la langue de l’entraineur ne change pas grand chose.

Avec plus de 20 pays représentés au sein de la LNH, on converge vers l’anglais dans le vestiaire des joueurs. Les pratiques et les réunions d’équipe sont dirigées dans la langue de Shakespeare.

Les journalistes, eux, doivent déjà interagir en anglais avec plusieurs joueurs et entraineurs, donc ils possèdent déjà les moyens pour s’ajuster à un instructeur anglophone chez le Canadien.

Pour le partisan, que le coach livre ses banalités au point de presse dans une langue ou deux n’affectera pas sa lecture de la section des sports.

Alors, pourquoi cette controverse?

La peur. La peur de perdre sa langue, sa culture et son héritage.

« Au Québec, le Canadien n'est pas seulement une équipe de hockey. C'est aussi une institution. Et comme toute institution, elle a des responsabilités envers son milieu. Parmi elles, la défense et la promotion du français» dit Philippe Cantin, du journal La Presse.

M. Cantin souligne une responsabilité de promouvoir et protéger le français. Nous pourrions donc sous entendre que, sans cette protection, la culture francophone s’écroulera et qu’elle sera assimilée par la mer d’anglophones qui l’entoure.

Notre culture est-elle si faible? Avons-nous réellement besoin de la protection du Canadien?

Un rapport de 2007 nous indique que 83% de la population Québécoise utilise le français à la maison. Cela représente au-delà de 6 million de personnes dans la province.

Les Québécois représentent un des peuples les plus éduqué sur la planète, avec plus de 60% de la population active possédant un diplôme postsecondaire.

Plusieurs compagnies d’envergure telles que Bombardier, Alcan ou Bell ont des liens étroits avec la province. À lui seul, le Québec représente la 44e économie mondiale et presque 20% de l’économie canadienne.

Mais il y a toujours cette peur. Cette peur de perdre sa place dans le monde.

«Il s'agit de montrer aux Québécois et au monde que le français est une langue moderne et dynamique, qu'on n'a pas à abandonner pour réussir à l'échelle de la planète» renchéri le journaliste André Pratte.

Abandonner? Le français est la deuxième langue la plus enseignée au monde. Globalement, le français est une langue officielle dans plus de 29 pays et est parlé par plus de 250 millions de personnes.

Le gouvernement du Québec entretient un réseau de délégations internationales dans plus de 25 villes à travers la planète. La province jouit d’une excellente réputation et attire plus de 7 million de visiteurs par année.

Les artistes de la province continuent de rayonner à l’étranger. Au-delà des noms célèbres comme Robert Lepage ou Céline Dion, d’autres comme Denys Arcand, Marie Laberge ou Malajube connaissent également du succès.

Plus que jamais, le français et le Québec semblent avoir une place de choix dans le monde.

Mais cette peur, il y a toujours cette peur.

Notre insécurité nous mène à scruter chaque décision sous un microscope linguistique.

Notre insécurité impose une atmosphère où nous avons parfois l’impression qu’il faut choisir entre le français ou l’anglais.

Cette peur, j’en ai assez.

Si nous croyons réellement en la force et l’importance du français, nous devrions avoir la confiance qu’elle peut cohabiter avec l’anglais et les anglophones, et même ceux qui sont unilingues.

Si nous croyons réellement aux capacités et aux talents des francophones, nous devrions les laisser faire leur place sans le fardeau des politicailleries. 

Notre langue, notre culture est-elle si précaire qu’il faut la défendre contre un simple homme, un simple entraineur, parce qu’il est anglophone?

À voir la réaction des médias, il faut croire que oui.

Pourtant, il me semble que nous sommes plus forts que ça. Moi, cette réaction m’insulte.

Pas vous?

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Louis est rédacteur pour HabsAddict.com et redacteur pour HabsWorld.net. Il vit presentement a Ottawa où il travaille pour l’Association canadienne des entraineurs. On peut le rejoindre à l.moustakas@habsworld.net

L'opinion est celle de l'auteur et ne reflète pas nécessairement les opinions de HabsAddict.com 

(Photo par Bruce Bennett/Getty Images)

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